Sept ans après le succès du grand film noir « KLUTE », l’essentiel de l’équipe (réalisateur, chef-op, musicien et star féminine) se retrouvent pour un beau western, situé en pleine WW2, et tout empreint de l’âme des pionniers d’antan.
« LE SOUFFLE DE LA TEMPÊTE » raconte simplement les derniers soubresauts du Far West de légende, menacé par l’arrivée des banquiers et des pétroliers, prêts à éventrer la terre, à chasser le bétail, et à éradiquer les ultimes cowboys, devenus quasiment anachroniques. À chaque fois que l’on voit une voiture ou un avion, cela produit le même choc visuel, tant le film est ancré dans le passé.
Le coup de génie du scénario, est d’avoir mis tous les ennemis de jadis dans le même sac : qu'ils soient d’irréductibles et héroïques éleveurs, ou d’infâmes ranchers, ils vont tous être balayés par le progrès, à brève échéance. Aussi, quand le très méchant Ewing élimine les représentants dudit progrès, en les massacrant comme au bon vieux temps, on ne peut s’empêcher d’applaudir des deux mains. Même si on a compris que ce n’était que partie remise.
L’autre belle chose du film, c'est l’hommage – conscient ou inconscient – que fait Jane Fonda à son père. Sans maquillage, vêtue comme un homme, le visage tanné par le soleil, le verbe rare, elle ressemble de façon saisissante au Wyatt Earp de « LA POURSUITE INFERNALE ». Et avec elle, passent tous les fantômes du western, du vieil Henry à John Ford. James Caan et Jason Robards sont excellents, comme à leur habitude, mais c'est Richard Farnsworth qui leur pique la vedette, dans un rôle magnifique de vieux cowboy au bout du rouleau, à l’œil malicieux. Lors de sa dernière scène, lorsqu’il s'éloigne à cheval vers les montagnes, où il a choisi de mourir, il symbolise de façon bouleversante l’agonie du vieil Ouest, voire de l’Amérique rêvée de pionniers.
« LE SOUFFLE DE LA TEMPÊTE » est aussi, et peut-être surtout, un film de directeur photo. Gordon Willis filme en contrejours, en clair-obscurs, utilise le format Scope à merveille, et parvient à rendre parfaitement palpable, l’atmosphère de ces contrées vierges, mais en sursis.
Un film très sous-estimé dans la belle carrière d’Alan J. Pakula.
À NOTER : on aperçoit au début du film un jeune Mark Harmon (« NCIS ») en co-équipier de Caan rapidement descendu, ainsi que le vétéran Jim Davis. Coïncidence, il travaille ici pour un homme nommé Ewing, lui qui devait trouver un tardif succès dans le soap « DALLAS », où il incarnait Jock Ewing.